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La réévaluation des immeubles dans une SCI à l’IR n’est pas opposable fiscalement (CE 19/09/2018)

06/11/2018
La réévaluation des immeubles dans une SCI à l’IR n’est pas opposable fiscalement (CE 19/09/2018)

 

Ce qu'il faut retenir

 

 

La réévaluation libre ne génère des conséquences fiscales que lorsque la société tient une comptabilité commerciale en application de l’article L.123-18 du Code de commerce.
Ce n'est pas le cas lorsqu'une société civile non soumise à l'IS, dont les associés personnes phyisiques ne sont pas soumis à l'IS, réévalue ses actifs puisqu'une SCI soumise à l'IR n'est pas obligée de tenir une telle comptabilité commerciale.

 

Aussi, la réévaluation réalisée par une SCI soumise à l’IR, dont les associés sont des personnes physiques, ne génère pas de base supplémentaire à amortir : la base d'amortissement demeure la valeur d'origine d'inscription au bilan.

 

La Conseil d’Etat du 19 septembre 2018 confirme la position de Cour administrative d’appel de Nantes du 16 février 2017.

 


BOI-BNC-BASE-30-30-20-30 § 500 à 510

 

 

Conséquences pratiques - Avis A&S

 

 

Lorsqu’une société civile non assujettie à l’IS et dont les associés sont des personnes physiques procède à une réévaluation libre de ses actifs : cette opération n’a aucune incidence fiscale. Par la suite, si une personne morale assujettie à l’IS en devient associée, ou si la société civile opte pour l’IS, il ne sera pas possible de déduire fiscalement l’amortissement supplémentaire qui résulte de la réévaluation "non imposée".



Une SCI à l’IR peut avoir intérêt à procéder à une réévaluation, afin d’augmenter la base des amortissements déductibles, mais elle peut le faire uniquement dans les cas où elle est obligée de tenir une comptabilité commerciale, c’est-à-dire :

  • après avoir opté à l’IS;
  • après avoir été assujettie de plein droit à l’IS : hypothèse du passage d’une location nue à une location meublée;
  • ou lorsque l'un de ses associés est une personne morale soumise à l’IS. En effet, lorsqu’une société civile non soumise à l’IS est détenue, en tout ou partie, par une société soumise à l’IS, elle doit déterminer la part de bénéfice correspondant aux droits de son associé soumis à l’IS, en application des règles de l’IS  (CGI. art. 238 bis K).

 

La réévaluation ne peut être réalisée par anticipation à un changement de régime fiscal. Dans ce cas, le Conseil d’Etat a pu en déduire qu’il importe peu que, postérieurement à la réévaluation, la SCI ait été obligée de tenir une comptabilité commerciale du fait de la présence d’un nouvel associé soumis à l’IS.
 
Avis A&S :

Selon la cour administrative d’appel de Nantes, une SCI non soumise à une comptabilité commerciale aurait pu amortir sur la base de la valeur réévaluée si la plus-value constatée lors de la réévaluation avait été taxée.

Cependant, le motif retenu par le Conseil d’Etat semble contredire cet argument :dès lors que la SCI n’est pas obligée de tenir une comptabilité commerciale au sens de l'article L.123-18 du Code de commerce, elle ne peut pas amortir sur la base de la valeur réévaluée des immeubles, peu important à cet égard que l’écart de réévaluation ait été taxé ou non.

 

 

Pour aller plus loin

 

1.Contexte

Doivent obligatoirement tenir une comptabilité commerciale au sens de l’article L. 123-18 du Code de commerce :

  • les sociétés commerciales;
  • les sociétés civiles ayant opté pour l’IS; 
  • les sociétés civiles assujetties à l’IS de plein droit (sociétés exerçant une activité commerciale comme la location meublée) ;  
  • les sociétés civiles à l’IR dont l’un des associés, personne morale, est imposé à l'IS, en BIC, BA ou BNC;
  • les sociétés de taille importante c'est-à-dire dépassant 2 des 3 seuils suivants :   
    • total bilan : 1 550 000 € 
    • chiffre d’affaires : 3 100 000 € 
    • nombre de salariés : 50

 

Les sociétés civiles n’exerçant pas d’activité commerciale ne sont pas contraintes de tenir une comptabilité commerciale, mais seulement une comptabilité de trésorerie. Cependant, la tenue d’une comptabilité commerciale est fortement conseillée afin de répondre à un éventuel contrôle fiscal, de matérialiser des comptes courants d’associés, de sécuriser la nature de certains flux.

 

Le Conseil d’Etat a eu l’occasion de rappeler que cette différence de traitement comptable entraîne un traitement fiscal différent entre sociétés civiles soumises ou non à une comptabilité commerciale.

 

 

2.Faits et procédure 

Les consorts A sont associés d'une SCI. Cette SCI est soumise à l’IR et détient un immeuble qu’elle met en location nue. 

 

A la clôture de l’exercice 2010, la SCI procède à une réévaluation libre de l’immeuble.
En 2011, les consorts A cèdent l’intégralité des titres de la SCI qu'ils détiennent à une société X soumise à l’IS. En application de l’article 238 bis K du CGI, la SCI à l’IR détermine le bénéfice correspondant aux droits de son associé à l’IS selon les règles de l’IS, c'est-à-dire en déduisant des amortissements (calculés sur la valeur réévaluée de l’immeuble).

 

L’administration fiscale redresse la société X et réintègre une partie des amortissements déduits (et correspondant à l’amortissement passé sur l’écart de réévaluation).
La société X forme une réclamation, rejetée par le tribunal administratif et la Cour d’appel de Nantes.

 

 

3.Arrêt

Le Conseil d’Etat confirme le redressement de la société X :

 

  • la SCI au moment de la réévaluation en 2010, n’avait pas opté pour l’IS et aucun de ses associés n’était soumis à l’IS, elle n’était pas obligée de tenir une comptabilité commerciale et ne pouvait donc pas procéder à une réévaluation libre prévue par l’article  L. 123-18 du Code de commerce. 
  • la réévaluation réalisée par la SCI est dépourvue de conséquences fiscales : le surplus des amortissements dû à la réévaluation n’est pas déductible.

 

 

4.Analyse 

Lorsqu’une société à l’IR opte pour l’IS en cours de vie sociale, le coût fiscal peut être important.

La société peut choisir entre :

  • conserver au bilan la valeur historique des immobilisations et inscrire au bilan les amortissements et provisions qui auraient été déduits si la société avait été soumise à l’IS depuis l’acquisition du bien. La base d’amortissement future est réduite et les plus-values ne sont pas taxées immédiatement mais au moment de la cession des immeubles (la plus-value sera mécaniquement importante en raison d'une valeur nette comptable faible).

 

  • réévaluer ses immobilisations : cette réévaluation entraîne la taxation immédiate des plus-values latentes (plus-values immobilières des particuliers à 19 % après abattement pour durée de détention) mais permet en contrepartie d'augmenter la base fiscale et comptable des amortissements.
CGI. art. 202 ter, II
 

L’option pour la réévaluation peut entraîner une double taxation :

  • d’une part la plus-value immobilière latente des particuliers a été taxée chez les associés (19 % après abattement pour durée de détention);
  • d’autre part, cette revalorisation sera également taxée au titre des plus-values de valeurs mobilières.

BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20-20 § 350

 

Cette double taxation est toutefois compensée par la possibilité d’augmenter la base d’amortissement des immobilisations.
 
Avis A&S : 

Avant la cession des titres, l’associé sortant a tout intérêt à ce que la société distribue l’écart de réévaluation (afin d’appréhender matériellement la plus-value sur laquelle il a été taxé).

 

Si l’écart de réévaluation n’est en principe pas distribuable (l’écart doit être inscrit dans le compte écart de réévaluation - C. com. art. L.232-11) il devient distribuable, et taxé en dividendes, lorsque la plus-value est matériellement constatée, c’est-à-dire : 

  • si l’immeuble est vendu;
  • ou au fur et à mesure de la constatation du supplément d'amortissement lié à l'écart de réévaluation.

 

Paradoxalement, le Conseil d’Etat du 12 juillet 2013 avait appliqué le Code de commerce à la SCI à l’IR pour taxer l’écart de réévaluation (taxation de la réévaluation lorsque la société procède à la distribution de l'écart en contravention de l’article L.232-11 du code de commerce, c’est-à-dire, en l’absence de constatation effective de la plus-value), alors qu’il dénie l’application de ce même code aux SCI à l’IR dans l’arrêt du 19 septembre 2018 (impossibilité pour une SCI non soumise à une comptabilité commerciale d'amortir sur une base réévaluée quand bien même l’écart aurait été taxé).

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