Réponse
Occuper gratuitement un logement détenu au travers d’une société à l’IR (SCI ou SARL de famille) est possible.
Juridiquement, il n’y a pas de risque d’abus de bien social lorsque la société est une SCI (mais il existe un risque en SARL) mais cette mise à disposition doit être autorisée par tous les associés (accord constaté dans les statuts ou par acte extra statutaire – Cass. civ. 3. 25/04/2017) ou à défaut par le gérant à la condition que l'objet social l'y autorise.
Exemple :
Un société ayant pour objet social, notamment, la gestion par bail ou autrement du bien désigné et de ceux dont elle pourrait devenir propriétaire, autorise, par sa généralité, le gérant à consentir toute autre forme d’occupation des biens concernés, y compris à titre gratuit, au profit notamment de tout ou partie de ses membres.
Cass. civ. 3. 11/02/2014
1. Mise à disposition d'un logement nu
Lorsqu'une société met à disposition gratuite de ses associés un logement nu, elle est considérée comme s’étant réservé la jouissance du logement :
- la société n’est pas imposée sur les loyers qui auraient dû être perçus mais ne peut pas déduire les charges afférentes au logement (y compris les éventuels intérêts d'emprunt contracté par la société pour acquérir l'immeuble),
- BOI-RFPI-CHAMP-20-20 § 10 - CE 7 juillet 1982, n°30975
Exemple :
- Si les dépenses d'entretien, impôts, taxes et assurances afférentes à l'immeuble sont mises à la charge de l'associé occupant, la mise à disposition gratuite peut être requalifiée en contrat de location (CA Versailles 25/04/2000)
- en cas de prêt contracté par la société pour acquérir le bien, et à défaut de loyer perçu par la société, les associés devront verser en compte courant d'associé le montant nécessaire au paiement des intérêts d'emprunt (ce qui nécessite dès lors de tenir une comptabilité de trésorerie).
Lorsque la société est une société civile, elle doit souscrire une déclaration n°2072 l’année de sa constitution. Elle est en revanche dispensée de déclaration les années ultérieures si la société ne perçoit et ne verse aucun revenu.
BOI-RFPI-CHAMP-30-20 § 240
Accessoirement :
La détention de sa résidence principale au travers d’une société fait perdre au contribuable :
- l’abattement de 30 % au titre de l’ISF (BOI-PAT-ISF-30-50-10 § 120),
- l’abattement de 20 % sur les droits de succession (BOI-ENR-DMTG-10-40-10-30 § 10),
- lorsque la société détient des biens de jouissance et des biens professionnels : le bénéfice de certains dispositif fiscaux qui nécessitent une activité opérationnelle prépondérante (dispositif Dutreil, exonération ISF des biens professionnels, et plus généralement pour bénéficier du statut de holding animatrice dans ces deux dispositifs) voire exclusive (SARL de famille).
Par contre, en cas de revente de l’immeuble par la société, l’exonération pour cession de la résidence principale reste applicable.
BOI-RFPI-PVI-10-40-10, § 140
2. Mise à disposition d'un logement meublé
Lorsque la société a acheté les meubles garnissant le logement, la société met alors à disposition gratuitement un logement meublé.
Les règles de BIC sont applicables :
- si le loueur est sous le statut LMNP, la société doit réintégrer dans son résultat un loyer fictif correspondant à la valeur locative du bien (sauf cas dans le cas particulier ou le bien est détenu dans une EURL soumise au régime micro) et peut dans ce cas déduite les charges et amortir l'immeuble sur tout l'année
- BOI-BIC-PDSTK-10-10-20, § 210 et 220
- BOI-BIC-CHG-10-10-30 § 40
- si le loueur est sous le statut LMP, la société n'intègre pas les loyers dans son résultat mais ne peut pas déduire les charges et notamment les amortissements et les dépenses somptuaires, comme l’achat, la location ou tout autre opération faite en vue d’obtenir la disposition de résidence de plaisance ou d’agrément ainsi que de l’entretien de ces résidences,
- CGI. art. 39, 4, c - BOI-BIC-PDSTK-10-10-20 § 200
- des sanctions pénales peuvent être encourues si les autres associés invoquent l’abus de bien social (en cas de détention via une SARL de famille par exemple).
3. Sous-location du logement par l'associé
Quelle soit nue ou meublée, la mise à disposition par la société n’autorise pas, en principe, l’associé à sous-louer le logement sauf à ce que la société ait expressément autorisé la sous-location, qui a priori doit rester ponctuelle.
Dans ce cas, l'associé n'aurait pas à reverser le loyer de la sous-location à la société et ne serait pas imposé à la condition que le logement constitue sa résidence principale et que les loyers de la sous-location soient inférieurs à certains plafonds :
- pour les locations habituelles d’une ou plusieurs pièces : 184 € par an en Ile-de-France, 135 € dans les autres régions,
- pour les locations saisonnières : 760 € par an.
BOI-RFPI-CHAMP-30-20 § 170
Références
BOI-RFPI-CHAMP-20-20 § 10 - CE 7 juillet 1982, n°30975
CA Versailles 25/04/2000
BOI-RFPI-CHAMP-30-20 § 240
BOI-PAT-ISF-30-50-10 § 120
BOI-RFPI-PVI-10-40-10 § 140
BOI-ENR-DMTG-10-40-10-30 § 10
BOI-BIC-PDSTK-10-10-20 § 210 et 220
BOI-BIC-CHG-10-10-30 § 40
BOI-BIC-PDSTK-10-10-20 § 200
BOI-RFPI-CHAMP-30-20 § 170